3 sept. 2014

Jeudi 3 septembre 1914

Louis Pergaud écrit à Marcel Martinet :

    "Merci vivement de ta bonne lettre. J'aurais engagé Delphine à vous aller rejoindre si, en même temps, je n'avais reçu d'elle une lettre m'annonçant son départ pour la Franche-Comté. A te dire la vérité, bien que je sois persuadé que Paris ne risque rien, j'aime autant la savoir près de mon beau-père et de ma belle soeur qui ont sur elle beaucoup d'influence et sont très capables de la remonter.
   Au demeurant, les risques pour moi sont réduits au minimum, mais nul n'échappe à sa destinée et pas plus sous les averses des shrapnells 2 que derrière nos murs je n'aurai d'émotion, je m'en rends très bien compte. J'ai la vague idée que je dois réchapper. Ainsi soit-il.
   Les lettres de Delphine vont m'arriver avec beaucoup plus de retard et très irrégulièrement ; chaque fois que tu pourras te fendre de quelques lignes dis-toi qu'elles seront ici les bien venues. Tu serais bien aimable de mettre sous l'enveloppe un ou deux "Job". Nous avons bien ici le tabac réglementaire, mais le papier commence à manquer ..."


2 shrapnells : il s'agissait d'obus chargés de balles qui sont projetées à l'explosion. On nommait également ces balles du même mot ! "Lardé de shrapnells au bras et à la cuisse, il se couchait sur le dos (...). Quand j'ai r'çu ma ferraille, j'ai dit: « Aux abatis, ça va. Rien dans l'buffet, ça colle »  (BenjaminGaspard, 1915, p. 79) ".